santé au travail

La santé au travail est une démarche interdisciplinaire, associant employés et employeurs, dans le but de créer un lieu de travail favorable à la santé et de lutter contre la « discrimination salariale selon l’état de santé »1.

Cette démarche met en place des programmes de bien-être au travail axés sur l'individu (le travailleur). Elle associe les aspects environnementaux, sociaux, ergonomiques et organisationnels de l'activité professionnelle, avec les problèmes de santé individuels, familiaux et communautaires. Le travailleur est considéré dans sa globalité et non plus sous un angle purement médical.

La santé au travail, concept apparu au début des années 1980, rejoint ainsi le concept de la « promotion de la santé au travail »2, apparu dans les années 1990. La médecine du travail fait partie de cet ensemble.

 


Définitions[modifier | modifier le code]

La santé au travail (France)
La santé au travail (France)

Le texte des Conventions et Recommandations de l'OIT se trouvent reprises en références3,4. La définition de la santé proposé par la Convention 155 de l'OIT de 1981 portant sur la sécurité et la santé au travail est la suivante : « le terme « santé », en relation avec le travail, ne vise pas seulement l'absence de maladie ou d'infirmité; il inclut aussi les éléments physiques et mentaux affectant la santé directement liés à la sécurité et à l'hygiène du travail. »

Un pas supplémentaire est franchi par la Convention 161 de l'OIT de 1985 portant sur les services de santé au travail : « l'expression « services de santé au travail » désigne un service investi de fonctions essentiellement préventives et chargé de conseiller l'employeur, les travailleurs et leurs représentants dans l'entreprise en ce qui concerne : i) les exigences requises pour établir et maintenir un milieu de travail sûr et salubre, propre à favoriser une santé physique et mentale optimale en relation avec le travail; ii) l'adaptation du travail aux capacités des travailleurs compte tenu de leur état de santé physique et mentale », ajoutant en son article 9, que « les services de santé au travail devraient être multidisciplinaires ».

La Recommandation 171 de l'OIT de 1985 va préciser les missions des services de santé.

La promotion de la santé au travail (voir introduction ci-dessus) se conjugue avec la santé au travail dans la Convention no 187 de l'OIT de 2006 portant sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, mettant ainsi en avant les avis conjoint OMS – OIT : « l'expression « culture de prévention nationale en matière de sécurité et de santé » désigne une culture où le droit à un milieu de travail sûr et salubre est respecté à tous les niveaux, où le gouvernement, les employeurs et les travailleurs s'emploient activement à assurer un milieu de travail sûr et salubre au moyen d'un système de droits, de responsabilités et d'obligations définis et où le principe de prévention se voit accorder la plus haute priorité. »

Le Comité mixte OMS-OIT, en 1995, définit ainsi la Santé au travail5 : « la santé au travail s’articule autour de trois objectifs distincts : (i) préservation et promotion de la santé dutravailleur et de sa capacité de travail; (ii) amélioration du milieu de travail et du travail, qui doivent être rendus favorables à la sécurité et la santé, et (iii) élaboration d’une organisation et d’une culture du travail qui développent la santé et la sécurité au travail. Cette culture s’exprime, en pratique, dans les systèmes de gestion, la politique en matière de gestion du personnel, les principes de participation, les politiques de formation, et la gestion de la qualité. »

Le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail (CCHST) définit ainsi la Santé au travail6 : « La santé au travail est une approche globale et intégrée en matière de santé qui vise toutes les personnes dans un lieu de travail et l'organisation dans son ensemble. Cette approche s'applique à une grande variété d'aspects touchant à la santé - conditions physiques et psychosociales, environnement, pratiques en matière de santé, ressources personnelles, etc. - par l'intermédiaire de programmes, de politiques et de pratiques. »

Pratiques actuelles[modifier | modifier le code]

Comme on peut le constater au paragraphe précédent, si le terme de « santé au travail » est ancien, il s'est défini progressivement, permettant à chaque pays de préserver ses pratiques, tout en les faisant évoluer vers la pluridisciplinarité, ce qui est un moyen, dans le but d'une démarche globalisante de prise en charge de la santé et le bien-être des travailleurs par eux-mêmes.

Cette démarche s'inscrit dans une démarche de promotion de la santé qui est « le processus qui confère aux populations les moyens d'assurer un plus grand contrôle sur leur propre santé, et d'améliorer celle-ci. » (Charte d'Ottawa, OMS, 1986).

La qualité de vie au travail (QVT) est un concept d’origine anglo-saxonne plus ancien, qui a émergé des théories des organisations dans les années 707.

L’intérêt en France pour ce sujet remonte à 2007 (Anact).

On est passé progressivement de la protection de la santé physique à la protection de la santé mentale des salariés, d’une logique de réparation / sanction des atteintes à la santé mentale des salariés à une logique de prévention des risques psychosociaux, d’une logique de prévention à une logique de promotion de la qualité de vie au travail8.

Les négociation des partenaires sociaux ont abouti le 8 juillet 2013, à un Accord National Interprofessionnel (ANI) sur la qualité de vie au travail et l'égalité professionnelle9.

La médecine du travail y trouve sa place selon les pratiques nationales. Les extrêmes de ces pôles sont d'une part les pratiques anglo-saxonnes (Grande-Bretagne et États-Unis d'Amérique) où les pratiques sont d'abord normatives dans un cadre multidisciplinaire et où la médecine du travail trouve une place congrue, lorsqu'elle existe et d'autre part les pratiques françaises, plus individuelles, où la médecine du travail est au centre du processus pluridisciplinaire.

Les autres pays se situent entre ces deux pôles dans leur façon d'aborder la santé au travail.

Qu’il soit considéré comme dû au hasard, comme un aléa prévisible de certaines activités professionnelles, ou comme conséquence directe des formes contemporaines d’organisation du travail, l’accident du travail n’est que la face visible des atteintes à la santé dues au travail. Une recherche menée en Suisse montre que le traitement social particulier dont l’accident fait l’objet est à mettre en relation avec les raisons qui expliquent l’émergence et le développement de l’assurance accidents, c’est-à-dire la suppression d’un éventuel conflit de classe sur la responsabilité de l’accident. Le développement assurantiel permet en effet de déplacer le conflit entre patronat et classe ouvrière, potentiellement dangereux pour l’ordre capitaliste, du terrain collectif et politique vers le terrain personnel et administratif.10

Partenaires de la santé au travail[modifier | modifier le code]

L'acteur principal de la santé au travail est le travailleur lui-même qui doit être capable de prendre en main sa santé (d'une manière globale et intégrée, voir les définitions).

L'employeur, sa ligne hiérarchique et les représentants des travailleurs au sein de l'entreprise sont en deuxième ligne.

Autour de ce triptyque, vont agir des « spécialistes » de la santé au travail. Ces derniers relèvent des pratiques nationales. Relevons parmi ceux-ci, les épidémiologistes, lesergonomes, les hygiéniste du travail et/ou industriels, les infirmières du travail, les ingénieurs de sécurité, les médecins du travail, les psychologues industriels, les toxicologuesindustriels, etc..

Dans le monde, et selon les pays[modifier | modifier le code]

Le stress et la pénibilité du travail font l'objet d'une attention croissante.

Pour sensibiliser à la question des relations de travail, il existe une Journée mondiale de la gentillesse, le 13 novembre (World Kindness Day). Promue par le World Kindness Movement créé à Singapour en 2000, elle est mise en œuvre en 2011 dans une quinzaine de pays, avec un appel pour la bienveillance au travail lancé en France en 201111.

Belgique[modifier | modifier le code]

La santé au travail se conjugue en Belgique de façon très diversifiée. La clé-de-voute de la santé au travail est l'analyse des risques, selon diverses méthodologies. Autour de ce concept s'organise les intervenants en santé au travail, qui sont de deux types. D'une part les conseillers en prévention de niveau 1: ergonome, hygiéniste du travail, ingénieur de sécurité, médecin du travail, spécialiste du psychosocial (psychologue par exemple), et des intervenants qui ne sont pas nommément repris dans la législation en tant que conseiller en prévention, par exemple les infirmier(e)s du travail, les épidémiologistes, les personnes de confiance dans l'entreprise, des intervenants spécifiques en promotion de la santé, etc.

En pratique, au niveau des entreprises, il existe les Services internes de Santé au travail (SIPP), qui comportent obligatoirement un "chef de sécurité", qui a suivi une formation de type technique plus ou moins importante selon l'importance et les risques présentés par une entreprise. Cet "ingénieur de sécurité" peut être entouré d'autres préventeurs, assurant ainsi un début de multidisciplinarité. Ces SIPP peuvent également, c'est facultatif et si l'entreprise est suffisamment grande, comporter un service interne de médecine du travail.

Les entreprises doivent également s'affilier à un Service externe de Prévention et de Protection au travail (SEPP), pour assurer toutes les tâches qu'elles ne peuvent remplir elles-mêmes. Ces SEPP comportent toujours deux sections. Une section multidisciplinaire d'analyse et de gestion des risques (qui comportent l'ensemble des spécialités réglementées de conseillers en prévention), et une section de médecine du travail.

France[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Santé au travail en France.

La santé au travail en France a été pensée et organisée au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. La santé était présente pour fabriquer la force de travail, et s'est imposée comme raison d'être de la sécurité sociale. Les syndicats de travail ont exigé une protection de cette force de travail12 : c'est la naissance de la médecine du travail. La santé était au service de l'économie d'entreprise.

Aujourd'hui, la mission première des Services de Santé au Travail en France s'est rapprochée peu à peu d'autres valeurs que celles de la simple action médicale du Médecin du Travail. Il ne s'agit pas de dire que le médecin n'a plus de rôle à jouer, mais qu'il n'est pas le seul acteur : le « manager  » est lui aussi impliqué. L'idée générale est de changer les relations entre le travail et la santé : « le travail fabrique de la santé ».

Les nombreux exemples de catastrophes en termes de santé au travail (SIDA, vache folle, Tchernobyl, hépatite B, ...) ont amené la mise en place du principe de précaution en France. Les juges sont désormais beaucoup plus sévères, et usent de la « faute inexcusable » contre les employeurs. De récentes jurisprudences ont montré l'importance de ce changement (Alsthom 2007 : l'exposition à l'amiante suffit à la condamnation, la maladie n'est pas nécessaire13).

La prise en compte de nouveaux risques au travail a ainsi vu le jour : cancérogène, mutagène et reprotoxiquerisques psychosociauxtroubles musculosquelettiques. Leur particularité est qu'ils ne sont pas liés à un métier spécifique, et aussi étendus à la population des cadres. Ils peuvent même ne pas être liés à l'activité de l'entreprise (ex: pandémie grippale).

La relation travail et santé est ainsi devenue un enjeu important pour la France. L'Eurogip évalue par exemple que le coût annuel du stress au travail était en Europe de20 milliards d'euros14. Ainsi, 50 à 60 % des journées de travail perdues seraient liées au stress. Malgré les moyens importants mis en jeu, de nombreuses personnes restent insatisfaites. La prise en compte de la santé au travail devient un enjeu économique.

À cet effet, un consensus général s'établit peu à peu pour changer les modèles. La santé au travail peut être abordée comme un projet, avec une gestion des risques encourus :

  1. proactivité, prévention ;
  2. privilégier les résultats ;
  3. se fonder sur des solutions éprouvées (« evidence based medecine ») ;
  4. comparer les évènements dans le temps ;
  5. surveiller les populations plutôt que les individus ;

La difficulté de la prise en compte de ces changements est l'existence de risques invisibles :

  1. Certains risques sont différés (par incubation, comme le cas de l'amiante) ;
  2. Les risques sont transversaux (exemple de la pandémie grippale) ;
  3. Les expositions ne sont pas tracées (exemple des centrales nucléaires) ;
  4. Les CMS, RPS, TMS ne disposent actuellement pas d'indicateurs en entreprise ;

La volonté actuelle consiste ainsi à faire apparaître l'invisible.